Jean « Django » Reinhardt est né le 23 janvier 1910 prés de Charleroi. La troupe de théâtre où jouait ses parents, faisait halte dans la banlieue de Charleroi. Né d’une famille manouche, il découvrira Paris quelques années plus tard. Il avait huit ans lorsque sa mère installa la roulotte prés de la porte de Choisy.
Très jeune Django fut attiré par la musique. A vrai dire, Django ne fréquenta pas l’école, mais la rue, les cinémas, et les salles de billard.
Django avait dix ans, lorsqu’il demanda à sa mère de lui acheter une guitare. Il lui fallut attendre un peu, et à 12 ans il eut cette guitare tant désirée. En fait c’était un banjo guitare que lui offrit un de ses voisins qui avait remarqué le goût du petit Django pour la musique.
Django ne quittait plus sa guitare, il dormait avec. Il apprit seul en regardant les musiciens jouer. Il fit rapidement impression sur les musiciens par sa dextérité et sa vélocité, personne n’arrivait à jouer aussi vite que le petit Django.
Puis il se mit à jouer avec un autre guitariste. Quelques temps plus tard Jean Vées, son oncle ou plus vraisemblablement son père, le découvrit dans un restaurant où il avait l’habitude de jouer. Il demanda à Django ce qu’il faisait là. Ce dernier lui montra ce qu’il savait faire et Jean Vées fut renversé par le savoir-faire de son « fils ». A partir de là il le garda à ses cotés pour jouer.
Django commença sa carrière de musicien à 13 ans, lorsqu’il faisait les bals avec Guérino. Puis il rejoindra l’accordéoniste Jean Vaissade. Enfin il fut recruté par le fameux chef d’orchestre britannique Jack Hilton. Malheureusement ce contrat ne fut jamais réalisé.
Le 2 novembre 1928 Django fut grièvement brûlé lors de l’incendie de sa roulotte. Il perdit l’usage de deux doigts et faillit être amputé d’une jambe. Avec l’aide de Jean Vaissade et des musiciens, il vit son sort s’améliorer. Son énergie, sa volonté et sa passion de la musique firent le reste deux ans après le terrible accident, Django inventa une nouvelle manière de jouer avec deux doigts raides.
Après les bals musettes Django fit la tournée des villes de villégiatures le Touquet, le pays basque et la côte d’azur. A Toulon il fit la connaissance d’Emile Savitry, un artiste du Montparnasse des années 20 qui va lui faire découvrir le jazz.
A l’automne 1931 de retour à Paris, Django participe à l’ouverture de la Boîte à Matelots rue Fontaine, où il fait partie de l’orchestre de Louis Vola avec Joseph »nin nin » Reinhardt à ses cotés. Une fois la soirée terminée, Django allait à la Croix du Sud, boîte de Jazz ; là il va rencontrer André Ekyan, le chef d’orchestre, avec lequel il va faire un bout de chemin et quelques disques. Avec André Ekyan, il y avait aussi Stéphane Grapelli.
Puis Django va devenir un accompagnateur vedette comme l’écrit François Billard dans Django Reinhardt, un géant sur son nuage (Lieu commun édit.), il accompagna notamment Jean Sablon. Il fallut attendre 1934 pour que Django et Stéphane Grapelli unissent leurs talents. Ils animaient les thés dansant de l’Hôtel Claridge sur les Champs Elysées, et durant les poses ils improvisaient et s’en donnaient à cœur joie. C’est ainsi que prit forme l’historique Quintet.
Toujours grâce à Emile Savitry, Django enregistra son premier disque en tant que soliste. Emile le fit découvrir à Pierre Nourry qui lui fit enregistrer Tiger Rag et After you ‘ve gone ainsi que Confessin’. En 1934 Charles Delaunay, secrétaire général du Hot Club et directeur de la revue Jazz Hot prit en main le quintet et en devint l’impresario.
Django venait de faire son entrée dans le monde du Jazz. En 1935 le Quintet fit ses débuts discographiques avec Lilly Belle May June, Sweet Sue Just you, Confessin et Continental.
En 1936 le quintet se fit connaître hors de nos frontières jouant à Barcelone. En 1937 la BBC leur consacra une émission, CBS les enregistrant au cabaret Big Apple à Paris. Le quintet était formé de Django, Stéphane Grapelli, Joseph Reinhardt, Gusti Malha et Louis Vola.
1937 année de l’expo universelle, conduisit le quintet à Londres après la Hollande et la Belgique. Cette année là le quintet enregistre Minor Swing une des premières compositions de Django.
Django au cours de ces années là se fit connaître des grands du jazz de passage à paris comme Louis Armstrong, et Coleman Hawkins, avec lesquels il fit des bœufs époustouflants. Puis Django côtoya Benny Carter, Bill Coleman. La renommée de Django était bien établie. L’année 1938 se termina au nouveau local du hot Club rue Chaptal en présence de musiciens renommés comme Duke Ellington, qui monta sur scène pour jouer aux cotés de Django.
1938 voit le quintet invité par Melody Maker, l’hebdomadaire musical britan-nique. Decca leur ouvrit ses studios. Ils enregistrent Honeysuckle rose, Night and day, souvenirs, Daphné, Stompin at Decca.
En 1939 c’est la tournée des pays scandinaves avec un passage en Norvège où Django fait l’éloge du Quintet du hot club de Norvège. La guerre mettra un terme aux tournées internationales. Django rentre à Paris, Stéphane Grapelli restant à Londres.
Django forma un nouvel orchestre avec Alix Combelle au saxo, Philippe Brun et Alex Renard aux trompettes, Baro ferret, à la guitare et Emmanuel Soudieu à la contrebasse. Ils se produisent au Jimmy’s à Montparnasse.
En 1940 Django et les siens prennent le chemin de l’exode, direction le sud. Puis ce sera le retour à Paris. Le jazz est devenu la musique des jeunes, le swing est demandé. Le nouveau quintet est rejoint par Hubert Rostaing à la clarinette. Cette année là fut créé Nuages.
Le quintet fut très demandé jusqu’en 1942, se produisant tant en province qu’en Belgique.
Le quintet ne put se produire qu’en province, le poids de l’occupation, les incitant à quitter Paris, où le travail se faisait rare. Django joue dans le midi et le sud Ouest. Il épouse en 1943 Sophie « Naguine » Ziegler qui lui donnera quelques temps plus tard un fils Babik.
Le débarquement en juin 1944 permit peu après aux jazzmen américains d’effectuer leur retour sur le continent. Django jouait au Tabarin à Pigalle, lorsque les premiers GI’s le découvrirent. Django se produisit à l’Olympia qui était le théâtre aux armées. Puis l’orchestre de Glenn Miller vint se produire à Paris, sans Glenn disparu quelques mois auparavant au-dessus de la Manche.
A cette époque Django fit son premier pèlerinage aux Saintes Maries de la mer. Django joua aussi pour les G I’s . en 1945 c’est l’heure des retrouvailles avec Stéphane Grapelli. Django est de retour à londres. Le jeu de Stéphane a évolué, s’est modernisé. Leurs retrouvailles donnent lieu à l’enregistrement de Django’s Tiger, Embraceable you, Love’s Melody, Belleville et une nouvelle version de Nuages.Django tomba malade et dut interrompre sa tournée pour regagner Paris.
L’hiver 1946-47 voit Django découvrir l’Amérique. Là il va rejoindre la tournée de Duke Ellington, et au Carnegie hall à New york. Il réussit la première soirée et oublia l’heure du spectacle le deuxième jour arrivant très en retard, ce qui lui valut une mauvaise critique !
Il resta à New York où il se produisit au Café society uptown. Son refus de revenir sur scène pour le bis, fut mal compris du public. Django n’avait pas réussi sa conquête de l’Amérique, au printemps il rentra sur Paris. Il retravailla avec le quintet.
En novembre 1948 ils sont engagés à Bruxelles. Là il retrouva Lousson Reinhardt –Baumgartner son fils aîné.
Puis durant l’été 1949 Django et Stéphane découvrent Rome et l’Italie. Ils enregistrent plus 70 titres dans les studios de la RAI.
Avec l’année 1950, la scène a changé, le jazz et Django sont moins en vogue. Néanmoins avec l’arrivée du Be Bop, Django va connaître un regain d’intérêt. Le Be Bop allait donner plus de place à l’improvisation et à la ligne mélodique et vit l’explosion de la guitare électrique.
En 1951 Django passa au Club Saint Germain (devenu depuis le Bilboquet). Django est entouré de Pierre Fouad, Raymond Fol saxo alto, puis Maurice Vander. Il enregistra notamment Anouam.
Puis Django va se retirer en 1952 à Samois pour peindre, son autre talent et pêcher à la mouche, tout en jouant au billard. On retrouvera Django accompagné par l’orchestre d’Aimé Barelli lors de l’émission Jazz variétés où Django fit une mémorable interprétation de Yesterdays.
Début 1953 on retrouve Django au Théâtre royal des Galeries aux cotés de Dizzy Gillepsie. Puis ce sera une émission de radio pour Norman Granz, émission qui devait faire la promotion de Django avant sa tournée aux Etats Unis. Django est entouré de Maurice Vander, piano, Pierre Michelot, contrebasse et Jean Louis Viale , batterie. En avril ce sera la dernière séance avec Sadi Lallemand, Martial Solal, Pierre Michelot, et Pierre Lemarchand. Au cours de Cette séance furent enregistrés le fameux Deccaphonie , le soir, Chez moi, et I cover the waterfront.
Django fut pris de maux de tête le 16 mai, il fut difficile de trouver un médecin et lorsqu’il fut hospitalisé, il était bien tard, Django s’éteignît à l’hôpital de Fontainebleau.
Django Reinhardt a donné ses lettres de noblesse à la guitare. Il fut l’un des premiers a propulsé la guitare sur le devant de la scène, avant Django la guitare est un instrument d’accompagnement, avec lui elle devient le centre du quintet.
Django c’est un style, et l’apport d’une culture, la culture manouche et sa propre culture au jazz. Mais Django n’est pas seulement un virtuose éblouissant, c’est un des grands compositeurs du XX° siècle.
Il suffit de rappeler ses compositions devenues des classiques du jazz, comme Nuages, Tears, Minor Swing, Djangology, Swing 39, 41, 42, Manoir de mes rêves, Sweet Chorus, Anouman, Place de Brouckère, Swing de Paris, Swing Guitars, Troublant Boléro,…
Woody Allen lui rend hommage dans son film Accords, désaccords dont le héros est un guitariste de Jazz des années 30, qui ressemble par certains cotés à Django. Il est permis de penser que le guitariste paralys‚ lorsqu’il était devant Django, n’était autre qu’Henri Crolla.
Django Reinhardt a légué au monde musical, un style, le jazz gitan et une école, celle de ces guitaristes de Jazz qui s’illustrent grâce un peu à Django. Nous citerons Joe Pass, le guitariste américain, et chez nous Henri Crolla, René Thomas, Elek Bacsik, Marcel Bianchi, Pierre Cavalli.
Plus prés de nous René Mailhes, Christian Escoudé, Jean Bonal, Sacha Distel, Philippe Petit, Raymond Boni.
Enfin le jazz gitan connaît un renouveau étonnant depuis quelques années, avec le regretté Babik Reinhardt, Boulou et Elios Ferré, Raphael Faÿs, Fapy Lafertin, Hans’che Weiss, Romane, Rudolphe Raffali, Marc Fosset, Laurent Bajata, Patrick Saussois, Romane, les frères Rosenberg, Dorado Schmitt, Tchavolo Schmidt, Francis Alfred Moerman, Dino Mehrstein, et au dessus du lot Birelli Lagrene.
Jean BACHELERIE, juillet 2008
Discographie (CD)
- Django mon frère (Charles Delaunay chez Eric Losfeld éditions)
- Un géant sur son nuage (François Billard & Alain Antonietto chez Lieu Commun ‚ditions)
- Django (Patrick Williams)
- Jazz Magazine (Nø 537 de mai 2003 avec un cédé de raretés.)
- Django Reinhardt (Coffret de 4 Cédés Universal)
- Djangology (Coffret EMI)
Avec le livret d’Alain Antonietto, Django Reinhardt. - Swing guitar (Long Box EMI)