Début 1961 cinq garçons du Kent : Dave Glyde (Major Griff West), saxo tenor, soprano, flûte et clarinette, Alan Holmes (Alan Boots Holmes), saxo ténor, baryton, flûte, flûte alto et oboe et cor anglais, Baz Elmes (Barrie Cameron), saxo baryton, orgue et piano, John Gillard (John St John), guitare et Dick Thomas (Wes Hunter) basse, renforcés par Tony Newman, venu du Middlesex, à la batterie forment un orchestre.
Nos 6 gaillards jouent comme semi professionnels dans le circuit des clubs et bals du samedi soir. Leur territoire est le Kent et le nord est de Londres, où ils passent régulièrement à Leyton au Leyton Baths. Les qualités du groupe, prouesse et originalité, furent rapidement reconnues et attirèrent l’attention des promoteurs de tournées. L’originalité tenait à la formule choisie au lieu du classique trois guitares et batteries, nous avions un véritable orchestre avec guitare, cuivres et piano.
Ce choix était du à leurs racines musicales, nos six gaillards admiraient le Memphis sound des Markeys. Last Night fut un tube en juin 1961. Leur répertoire était le R & R et le R & B. Leur nom Sounds Inc. (société anonyme des sons) souligne la filiation.
Don Arden l’un des principaux organisateurs de tournées en Grande Bretagne eu vent de leur réputation et envoya son bras droit Henry Henriod aux Leyton Baths pour les auditionner. Wes Hunter se souvient du jour où H. Henriod vint les voir, c’était l’anniversaire de John Saint John, le premier avril 1961. H. Henriod comprit tout de suite que ces jeunes avaient du talent, et il leur proposa une tournée des théatres et salles de bal où ils accompagneront un des grands rockers américains : Gene Vincent. Les Sounds inc. étaient mis sur orbite.
Dans la foulée Gene Vincent les prend pour l’accompagner sur son nouveau disque : I’m going home / love of a man enregistré en juillet 1961. ils font aussi leurs débuts à la télévision à Thank you lucky star, où ils accompagnent Gene. On les retrouve avec Gene au Saturday Club de la BBC, puis dans le film musical It’s trad dad toujours avec Gene.
Sounds Inc. ne dormirent pas sur leurs lauriers et décidèrent de devenir le meilleur orchestre anglais pour accompagner les Rockers américains en tournée au Royaume Uni. C’est ainsi qu’ils travaillèrent le répertoire des vedettes qui allaient venir en tournée, Barrie Cameron fit la liste des chansons de chaque artiste et ils firent les arrangements afin d’obtenir le meilleur son possible, aussi prés que possible du son original. Ils répétèrent dans l’arrière salle d’un pub du sud ouest de Londres, le Peel Pub à Woolwitch. Ils travaillèrent d’arrache pied jusqu’à jouer chaque chanson à la perfection. Lorsque le chanteur arrivait, ils étaient prêts à faire chavirer les auditoires. La qualité de leur accompagnement en faisait un groupe très demandé.
Ils ont ainsi eu le privilège d’accompagner outre Gene Vincent, Jerry Lee Lewis en 1963, Little Richard (62), Sam Cooke, Ben E King en 1964, Brenda Lee 1962 (notamment sa tournée qui passa par l’Olympia à Paris), Mary Wells, The Shirelles, Eddie Floyd, P.J.Proby, Freddie Cannon, Gene Pitney, Joes Feliciano et Big Dee Irwin.
Coté britannique ils accompagnèrent Cilla Black, y compris en studio (Heat wave & Love letters), Long John Baldry, Millie,et… Les Beatles dans Good Morning de l’album Sergeant Pepper, puis dans l’émission télévisée Around the Beatles, du fameux et incontournable Jack Good. Jack Good les présenta à un jeune chanteur qu’il venait de faire venir des USA : PJ. Proby.
Coté enregistrements instrumentaux ils débutèrent chez Parlophone en 1961 avec Mogambo/Emily,Ce premier disque est suivi en 1962 par Wilhelm Tell/Light Cavalry (Philipps Allemagne), puis fin 1962 Sounds like locomotion/ Taboo chez Decca. En 1963 ils apparaissent sur un album enregistré en public au Star Club de Hambourg où ils jouent William tell/Light Cavalry. Puis on les retrouve chez Decca avec Go/ stop, go (de Dave baby Cortez) qui a servi un temps d’indicatif à Radio Caroline, Keep movin/Order of the keys.
Il faudra attendre leur passage chez Columbia en 1964, grâce à leur nouveau manager Brian Epstein, pour les voir entrer au hit parade avec the Spartans/Detroit (30 ) ce dernier titre inspiré par Green Onions de Booker T & the MGs puis Spanish Harlem/Rinky Dink(35 ) suivi de William Tell/Bullets.
Toujours en 1964 Columbia sort le premier album Sounds Inc.En août 1964 ils apparaissent au show Top Gear comme accompagnateurs de Cilla black et jouent l’indicatif de l’émission. Cela donne un Ep Top Gear/ Spartans/Spanish Harlem/Detroit.
Ils commencérent 1965 avec Time for you/Hall of the Mountain King, suivi de My little red book/Justice Neddi, puis On the brink/I’m coming through, ce dernier titre remplacera Go comme indicatif de Radio Caroline.
En 1966 EMI sort leur deuxième album.
Au début de 1967, Tony Newman quitta le groupe pour devenir requin de studio, il fut remplacé par Terry Fogg, un jeune et talentueux batteur de Chesterfield. Ce ne devait pas être le seul changement puisque fin 1967 Barrie Cameron quitta aussi Sounds Inc. pour devenir arrangeur et organisateur de spectacles. Il fut remplacé par Trevor White de Maldon en Essex, qui était aussi un excellent chanteur.
Le groupe changea de direction et adopta le style flower power puis heavy rock et devint un groupe pour les boites de nuit du circuit mondial.
Comme le rappelle Wes Hunter à la fin de la décennie soixante, il y eut dans le nord et l’est de l’Angleterre l’ouverture de nombreuses boites de nuit luxueuses, qui offrirent aux groupes et artistes de nouvelles possibilités de travail à coté du circuit des salles de bals et des soirées du samedi soir. « Là nous avons appris à divertir le public et plus seulement à jouer nos musiques préférées. C’est grâce à ce circuit que nous avons rencontré un tourneur australien, qui nous a fait venir dans ce nouveau monde qu’est l’Australie. Là nous nous sommes produits dans le circuit des clubs de rugby à XIII dans la région de Sydney. Nous avons joué au St Georges Leagues Club, l’endroit le plus fameux devant plus de 2000 personnes. Nous connaissions cet endroit pour y avoir joué dans le cadre de la tournée de Cilla black et des Beatles. De plus notre disque William Tell avait été numéro un en Australie à ce moment là. Nous sommes restés en Australie jusqu’en 1971, nous produisant au Sidney Hilton, et aussi sur la Gold Coast, paradis des surfers au Currumbin Hotel, ainsi qu’à Adelaide, Melbourne, Canberra et Perth ».
Jean BACHELERIE
Interview
- La tournée de Little Richard en 1962. Nous avons fait connaissance avec Little Richard à Doncaster première étape de la tournée. Nous avions répété son tour de chant comme à l’habitude. Cependant lors de notre seule et unique répétition avec le King of R & R et son organiste Billy Preston, Barrie jouait au saxo baryton, ce qui nous donnait un son très proche des Trenniers. Richard qui traversait une de ses périodes mystiques, nous passa les arrangements de son répertoire c’étaient des gospels, rien que des gospels ! Nous étions complètement déstabilisés. Le choc n’était pas seulement pour nous mais aussi pour les autres artistes de la tournée comme Jet Harris. On s’est mis à répéter des heures durant son répertoire gospel. Nous nous demandions tous comment le public de Doncaster allait nous accueillir avec un tel répertoire. Au dernier moment Richard nous lança un regard méchant et hurla « au cas où » et il attaqua une version diabolique de Good Golly Miss Molly à notre grand soulagement ! Nous avons pratiquement terminé la tournée en Allemagne à Hambourg au fameux Star Club. Là nous avons fait connaissance avec the Beatles, qui étaient un des groupes résidents. Depuis nous sommes toujours restés amis avec les Beatles. Cela nous a permis de faire de formidables tournées avec eux, notamment aux USA où nous avons joué au Shea Stadium, ce qui est sans doute le plus beau concert que nous ayons jamais donné, devant une foule énorme.
- Autre anecdote, notre première rencontre avec Jerry Lee Lewis que nous allions accompagner pour sa tournée, c’était au Saint Andrews une grande salle à Glasgow, nous avions fait la première partie du spectacle et Jerry n’était toujours pas là ! il est arrivé à l’entracte, étant le plus grand du groupe, je fus désigné pour aller le voir dans sa loge pour organiser notre coopération avec le lunatique Jerry. J’ai tapé à la porte, qui fut aussitôt ouverte et je me suis trouvé face à un colosse, je bredouillais je suis de l’orchestre et voudrait parler avec Jerry. Le colosse me répliqua Jerry ne répète pas et me claqua la porte au nez ! le bruit courut alors qu’il voulait seulement un guitariste et un bassiste, car il avait emmené son batteur, qui était aussi son cousin ! John et Wes étaient saisis d’un trac énorme à l’idée de devoir jouer avec Jerry et un batteur qu’ils ne connaissaient pas du tout, devant 2000 écossais fanatiques de R & R. Ils attendirent anxieusement le moment d’entrer en scène après Jerry. Il prit place au piano, régla son ampli et se tourna vers nous deux et nous cria aller en route les gars, on attaque en ré et c’est parti ! Quelques soirées après, Jerry prit le temps de nous écouter et il renvoya son cousin dans ses foyers et Tony le remplaça .
- Encore une anecdote, nous étions en Allemagne où nous accompagnions le fameux Sam Cooke au Nimbus Club dans la base de l’armée américaine à Wiesbaden. La boîte était pleine à craquer. Le public était presque exclusivement noir. Lorsque nous sommes venus chauffer la salle, on a lu sur leurs visages l’étonnement et la déception, quoi un orchestre blanc pour accompagner notre Sam Cooke ! Tony eut la bonne idée de changer le morceau d’ouverture, il attaqua les premières notes de Last Night, et ce fut géant, le public oublia que nous étions blanc et fut soulagé, nous savions jouer leur musique aussi bien que leurs frères.
- Autre grand moment début 1963 nous avons été invité aux Etats Unis pour jouer à Derborn prés de Detroit pendant un mois dans le cadre d’un échange avec Johnny & the Hurricanes, invité pour un mois en Angleterre. Ce fut une expérience fameuse, les radios commerciales nous invitaient à leurs émissions, et nous faisaient jouer toutes sortes de morceaux dans des styles très variés. Ces émissions étaient en public et il fallait jouer ce que le public demandait comme Green Onions de Booker T & the M Gs ! A notre retour en Grande Bretagne nous étions gonflé à bloc, et le premier soir à Romford dans l’Essex, nous avions décidé de montrer à nos jeunes compatriotes ce qui se faisait de mieux de l’autre coté de l’Atlantique. Nous avons attaqué par Green Onions, malheureusement pour nous Booker T & the MGs étaient inconnus à Romford !
- Barrie Cameron est toujours arrangeur et copiste, il vient de terminer un travail pour Elaine Page.
- Alan Holmes enseigne les bois aux enfants, payant beaucoup de sa personne pour leur faire partager sa passion pour la musique et leur transmettre son savoir faire en matière d’instruments à vent. Il compose aussi et joue toujours. Il accompagne the Rapiers sur certains morceaux de leur dernier disque you ‘re never alone with the Rapiers (Go back to daddy, Good golly Miss Molly). Par ailleurs il écrit un livre sur Sounds Inc.
- Major Griff West est resté en Australie où il poursuit sa carrière de musicien.
- John Saint John est aussi resté aux antipodes où il a fondé son entreprise de jingles et un studio d’enregistrement.
- Tony Newman vit aux USA, prés de Nashville, il continue à jouer notamment pour Crystal Gayle et accompagne avec Albert Lee les Everly Brothers notamment lorsqu’ils viennent en Europe.
- Terry est aussi resté en bas en Australie et travaille dans un studio d’enregistrement.
- Trevor est aussi à Sydney et travaille avec John, c’est un chanteur toujours demandé.
- Dick, (Wes Hunter) s’est retiré du monde musical il y a peu, après avoir passé les quinze dernières années comme représentant de Peavey auprès des magasins de ventes et ou location d’instruments et matériel de musique.
D’après Ray Blake, Wes Hunter, Davy Peckett et Trev Faull.
Discographie (CD)
- (Pas de titre) (Pas de référence)
I’m going home / Love of a man (juillet 1961).
Avec Gene Vincent - (Pas de titre) (Pas de référence)
Film musical «It’s trad dad».
Avec Gene Vincent - (Pas de titre) (PARLOPHONE)
Mogambo / Emily (1961).
Mogambo est inspiré par Mau Mau, le tube des Wailers, Emily est un bon rock
dédié à leur camionnette Emily qui fit leurs premières tournées ! - (Pas de titre) (PARLOPHONE)
William Tell / Light Cavalry (1962, Philipps Allemagne). - (Pas de titre) (PARLOPHONE)
… / William Tell / Light Cavalry / …
En 1963 ils apparaissent sur cet album enregistré en public au Star Club de Hambourg. - (Pas de titre) (DECCA)
Sounds like locomotion / Taboo (fin 1962). - (Pas de titre) (DECCA)
Go, stop, go (*) / Keep movin / Order of the keys.
(*) de Dave Baby Cortez, qui a servi un temps d’indicatif à Radio Caroline). - (Pas de titre) (COLUMBIA)
The Spartans / Detroit.
Detroit est inspiré par Green Onions de Booker T & the MGS. - (Pas de titre) (COLUMBIA)
Spanish Harlem / Rinky Dink. - (Pas de titre) (COLUMBIA)
William Tell / Bullets. - (Pas de titre) (COLUMBIA)
- Album Sounds Inc. William Tell / Fingertips / I’m in love again / Rinky dink / Bullets / Last night / Sounds like movin / The crane series theme / Maria / Light Cavalry Sounds like movin est un mélange de Wham (Lonnie Mack) et You can’t sit down
(Phil Upchurch). - (Pas de titre) (COLUMBIA)
Top Gear / Spartans / Spanish Harlem / Detroit. - (Pas de titre) (COLUMBIA)
Time for you / Hall of the Mountain King (1965).
(COLUMBIA) - (Pas de titre) My little red book / Justice Neddi / On the brink / I’m coming through.
Ce dernier titre remplacera Go comme indicatif de Radio Caroline. - (Pas de titre) (COLUMBIA)
- 2ème album Gold finger / Little bird / If we lived on top of a mountain / Grab this thing / Yesterday / Boil over / What now my love / Zorba’s dance / Bahama sound / On the rebound / The old and the new / Legend of Lyndos / Twilight of an empire.
‘Boil over est dédié’ à King Curtis, ‘On the rebound’ à Floyd Cramer et ‘Grab this thing’ aux Markeys.